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Azote Potentiellement Minéralisable (APM) et rendement du blé bio : étude de la pertinence d’une méthode nouvelle pour mieux comprendre le fonctionnement de son sol

Pays de la Loire

Le laboratoire SolYves développe actuellement un protocole pour mesurer l’APM en routine. Cet indicateur intéresse fortement les animateurs du réseau GAB/CAB Pays de la Loire car il pourrait être pertinent pour accompagner les producteurs adhérents qui se posent des questions sur le pilotage de la fertilisation (céréales d’hiver notamment). Cet article fait le bilan sur les enseignements du travail mené en 2024 (non exhaustif), avec un focus sur les résultats du GAB 85, plus aboutis à l’heure actuelle grâce au travail de stage de Nina.

Pour qu’il talle correctement et pour obtenir un nombre suffisant d’épis/m² par la suite, le blé a spécifiquement besoin d’azote en sortie d’hiver (février-mars), avant le stade épi 1 cm (30 UN suffisent). Or, c’est justement à cette période que l’azote manque souvent dans les sols : lixiviation après l’hiver pluvieux, sol humide et froid peu propice à la minéralisation, influence de la couverture et du travail du sol, etc… D’autant plus qu’en bio, les apports fertilisants organiques doivent être « digérés » par une vie du sol réveillée et active, là où l’azote soluble des engrais chimiques conventionnels est très rapidement efficace. En fonction du type de sol, de l’historique des pratiques, de la teneur en MO, etc… chaque parcelle a un potentiel différent qu’il peut être intéressant de mieux connaître afin d’anticiper les besoins du blé et d’ajuster au mieux les éventuels apports de printemps. La mesure de l’Azote Potentiellement Minéralisable (APM) dans le sol de sa parcelle peut s’avérer utile pour quantifier ce potentiel. En 2024, l’objectif a été de tester cette méthode pour 1) mesurer l’influence de l’APM sur la productivité du blé afin d’identifier s’il peut être un indicateur pertinent pour améliorer les rendements en blé avec moins d’apports organiques et 2) identifier les facteurs qui influencent le niveau d’Azote Potentiellement Minéralisable dans le sol.
En janvier 2024, des échantillons de terre ont été prélevés puis envoyés au laboratoire SolYveS pour une mesure de l’Azote Potentiellement Minéralisable (APM). Concrètement, une mesure de l’azote immédiatement disponible a été réalisée dès réception au labo (comme un reliquat sortie d’hiver mais uniquement pour l’azote NO3-) puis les échantillons ont été placé 1 mois en étuve à différentes températures :

  • – 12,5°C : pour simuler le potentiel de minéralisation pendant 1 mois dans les conditions du sol en février/mars. Pour rappel, l’ammonification dans le sol démarre à partir de 8°C et la nitrification à partir de 12°C. C’est donc une mesure d’intérêt pour la compréhension de la nutrition du blé en reprise de végétation.
  • – 20°C : pour simuler ce que l’échantillon de sol peut potentiellement fournir entre la sortie d’hiver et le mois d’avril. Cette mesure est intéressante pour comprendre la nutrition du blé en milieu de printemps
  • – 28°C : pour simuler ce que l’échantillon de sol peut potentiellement fournir entre la sortie d’hiver et la sécheresse estivale. Cette valeur est surtout intéressante pour donner une idée du potentiel de nutrition pour une culture de printemps/été, mais est a priori peu utile pour le blé.
 
 
 

Graphique 1 : Azote Potentiellement Minéralisable (APM) à 12°C, 20°C et 28°C pour les 20 parcelles suivies en Vendée. 

Chaque barre correspond à une parcelle, dénommée par les initiales de l’agriculteur et le nom de la parcelle. Dans un but de comparaison des parcelles, les valeurs ont été corrigées. Elles intègrent la pierrosité réelle mesurée, une densité de sol arbitraire fixée à 1,35 et une profondeur de sol de 0-20 cm pour chaque valeur. Pour les parcelles avec une préparation de sol à seulement 5 ou 10 cm de profondeur, deux horizons ont été distingués (horizon A et B) : les APM de l’horizon B sont en clair (3 parcelles concernées). Le point noire cerclé de jaune indique l’azote immédiat, c’est-à-dire la teneur en nitrates de l’échantillon avant mise à incubation. Attention : ces valeurs ne sont que des potentiels dans des conditions contrôlées et on ne connaît encore rien de leur validité sur le terrain.

Le graphique 1 regroupe l’ensemble des résultats d’APM pour les 20 parcelles de blé et blé-féverole suivies en Vendée en 2024. Les valeurs d’APM cumulés sont très variables d’une parcelle à l’autre, avec des potentiels allant de 31 UN/ha (FP_Peault_L) à 75 UN/ha (RG_Chaltiere_B et RF_Moucoirs). Pour l’APM 12°C, qui nous intéresse spécifiquement, les valeurs vont de 7 UN (FP_Peault_L) à 36 UN/ha (RF_Moucoirs, horizon A et B cumulés). Le rapport entre l’APM 12 et l’APM 28 donne une indication sur la vitesse de minéralisation et sur le profil des MO de l’échantillon de sol. Par exemple, pour les parcelles FF_Bellevue, RF_Moucoirs, SS_CoteauH, l’APM 12°C représente la moitié de l’APM global (APM12 / APM28 = 0,5) ; on peut en déduire que la minéralisation est précoce sur ces parcelle, et donc plutôt adaptée au blé. A l’inverse, ce rapport est de seulement 0,2 pour la parcelle AJ_Epinay, qui apparaît donc comme une parcelle à minéralisation plus tardive. Chez certains agriculteurs (FF, SS, AJ), deux parcelles ont été choisies, l’une à bon potentiel pour un blé, l’autre à moins bon potentiel. On retrouve cette différence de potentiel en observant l’APM 12°C, plus élevé sur la parcelle dite à meilleur potentiel pour chacun des trois binômes (du simple au double). Pour deux parcelles (FF_Renaudins et RG_Chaltiere), des mesures ont été réalisées en haut et en bas de la pente. Dans les deux cas, l’APM 12°C est plus élevé en bas de pente (x1,6), ce qui témoigne d’un transfert de fertilité du fait de l’érosion. Autre observation, la valeur d’azote immédiat (teneur en nitrates avant mise à incubation) est souvent très différente de l’APM 12°C, par exemple sur DB_15.1 ou SS_CoteauH, où elle représente 20% ou 40% de l’APM 12°C. Cela confirme l’information supplémentaire apportée par l’APM 12°C en comparaison d’un reliquat sortie hiver : un échantillon peut avoir une faible teneur en nitrates à une date donnée mais un bon potentiel de minéralisation dans le mois à venir. Enfin, à ce stade de l’observation des données, et même en connaissant l’historique de chacune des parcelles, il est difficile de voir quel facteur influence réellement l’APM, et notamment l’APM 12°C.

Influence de l’historique prairie sur l’APM
Une étude précédente du CIVAM BIO 53 laisse penser que l’historique de la parcelle, selon si elle a été en prairie plus ou moins récemment, a une influence sur les valeurs d’APM et sur la vitesse de minéralisation. L’hypothèse est que, après une absence de prairie de plus de 10 ans, la part facilement dégradable de la MO a déjà été bien utilisée par les plantes et se concentre ainsi une MO plus coriace qui a besoin de températures plus élevées pour être utilisable. Ainsi, l’influence de ce reliquat d’azote prairial serait plutôt tardif pour le blé, en jouant plutôt sur les paramètres de fin de cycle, comme le taux de protéine, le PMG ou le nombre de grains.

Graphique 2  : APM 12, 20 et 28°C en fonction du temps passé depuis la dernière prairie sur la parcelle

Dans notre étude, il apparaît que les parcelles ayant été en prairie dans les 5 dernières années ont un APM 28°C plus élevé que celles sans prairie depuis plus de 10 ans (Kruskal Wallis, p = 0,01). On observe la même tendance pour l’APM 20°C, bien que non significatif (p = 0,07). Par contre, l’historique prairie n’a pas influencé l’APM 12°C. Ce résultat vendéen conforte donc notre hypothèse de départ. Au niveau régional, l’analyse des données n’est pas encore finalisée ; toutefois la tendance semble aller dans le même sens.

La conclusion de cette première année de travail est positive. Le protocole au laboratoire semble être bien calé, et malgré la dynamique de minéralisation perturbée cette année par la météo pluvieuse, les premiers résultats permettent des observations encourageantes. L’étude sera poursuivie en 2025, avec la volonté d’étudier spécifiquement le lien entre les APM et des paramètres sur lesquels les producteurs.rices peuvent avoir une influence. Ainsi, le choix a été fait de se focaliser sur l’influence de la fertilisation d’automne (ou des engrais verts estivaux) sur les APM 12 et 20°C, afin d’apporter des éléments dans le débat sur l’utilité des apports avant le semis de blé.

Samuel OHEIX (GAB 85)

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  • GAB 44 :  02-40-79-46-57
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  • CIVAM Bio 53 : 02-43-53-93-93
  • GAB 72 : 02-43-28-00-22
  • GAB 85 : 02-51-05-33-38
 

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